lundi 30 avril 2012

la conversion qui fait entrer dans la vie - textes du jour

Lundi 30 Avril 2012

Prier le soir les textes de la liturgie catholique du jour, dans la fatigue… la liturgie byzantine s’y prête parce que l’essentiel est la nuit qui y prépare, le soir n’est pas conclusif, il est préparatif. En Grèce, j’ai reçu deux chocs qui n’ont fait écho qu’en très longue durée, le retour à la liturgie, des jours et des nuits de liturgie dans ce qui ne semble décor que quand on ne connaît ou quand le temps a passé, ce n’est pas de l’harmonie que ces paysages, ces moines, ces lumières-lueurs, je n’ai pas souvenir du soleil au Mont Athos. J’ai vécu ce qui me semblait naturel en le vivant. Et puis dans l’île de Samothrace coincé autant par la tempête empêchant les bateaux du retour d‘accoster, que par une cheville foulée en rentrant à flanc de colline depuis le site archéologique, seul, à l’obscurité tombante, on était déjà en Novembreau retour. Le petit hôtel sur le quai et dans mon sac, je ne sais pourquoi ni comment, dans mon sac, l’histoire d’une âme en édition de l’époque, avec culs-de-lampe et le texte expurgé, ce que je ne savais pas, et ce qui n’a pas la moindre importance, l’exemplaire pffert par mon arrière-grand-mère à ma grand-mère, je m’attendais sauf à être pris par le souffle de l’unique aventure. Liturgie millénaire, l’attractivité de la confiance dans une vie sans date que les étapes où Dieu se discerne puis se dérobe… j’écris cela ce soir dans ma fatigue tranquille. L’histoire et la situation de notre pays dans le cœur, dans l’intelligence et mes aimées chacune à une distraction. Rumeur de ces policiers intimistes (SIMENON) donnés en noir-et-blanc. Impatiences et triomphes de notre fille à ses jeux connectés. La nuit tombée. Solitude de Jésus, volontaire mais au vu et au su des siens qui la respectent, la prière de nuit. Envoie ta lumière et ta vérité, qu’elles guident mes pas et me conduisent à ta montagne sainte, jusqu’en ta demeure. J’avancerai jusqu’à l’autel de Dieu, vers Dieu qui est toute ma joie. [1] Itinéraire, marche, celle des brebis conduite par le bon pasteur. Quand il a conduit dehors toutes ses brebis, il marche à leur tête, et elles le suivent, car elles connaissent sa voix. Cheminement de Pierre vers l’universalité de l’Eglise et du salut. J’étais dans la ville de Jaffa, en train de prier … il commence par se récrier, comme le soir du lavement des pieds : certainement pas, Seigneur ! Puis, il comprend et fait comprendre. L’Esprit me dit d’aller à eux sans me faire de scrupule…. Alors, je me suis rappelé la parole que le Seigneur avait dite… En entendant ces paroles, ils se calmèrent et ils rendirent gloire à Dieu. [2] La lecture de notre vie entière, l’examen de notre journée, la prière après la lecture d’un chapitre de sa petite Bible, notre enfant qui va s’endormir sur le bon pasteur, sur l’enseignement du Notre Père, sur le pharisien et le publicain montant au Temple. Nos conversations. Nous nous éduquons mutuellemen. Pierre révise ses propres jugements, se rappelle les paroles de son Maître. Pais mes agneaux, pais mes brebis. Ces ovins par milliers dans la steppe kazakh, roulant et ondulant comme ces épineux sans racines, l’immensité plate, le ruban droit pendant des centaines de kilomèttes parfois longeant la voie ferrée, des trains d’un ou deux kilomètres. Les troupeaux sont à l’échelle, l’homme ne l’est pas. Mon âme a soif de Dieu, le Dieu vivant : quand pourrai-je m’avancer, paraître face à Dieu ? Réponse du Christ : si quelqu’un entre (tout le monde a eu son entrée dans la vie) en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra aller et venir, et il trouvera un pâturage. Chacun sa personnalité, son parcours. Je suis venu pour que les hommes aient la vie, pour qu’ils l’aient en abondance. Echo de l’histoire sainte, la nôtre : Voici que les païens eux-mêmes ont reçu de Dieu la conversion qui fait entrer dans la vie. Nuit noire malgré la demi-lune, un nuage qu’elle illumine, quatre cinq fois son envergure lui fait rapidement écrin, un baiser en passant, Marguerite me demande quand l’on aperçoit sa constellation.       


[1] - Il est difficile de rester pur dans une société dépravée, corrompue, où se font rares les individus dignes de confiance, honnêtes et loyaux, où règne la loi des plus forts, des plus malins, des plus rusés, rompus au double langage comme s’ils avaient deux cœurs, persauéds que leur dexérité verbale leur confèrera la suprématie et que Dieu lui-même n’y peut rien (verset 5). Mais contre cette génération corrompue par le détournement de la vocation du langage, l’arme la plus efficace est la parole divine (verset 7) dont la pureté absolue a le pouvoir de protéger ceux qui sont pris au piège (verset 6) des paroles doucereuses des flatteurs. Récité à chemini’atséret le huitième jour de souccot, en raison de son titre, … ‘al hacheminit = sur l’octave, mais aussi parce qu’après ce dernier pèlerinage de l’année effectué à Jérusalem, le peuple va retourner dans le monde tous les jours où il devra s’affronter à l’injustice, la corruption, la tromperie… Il est bon auparavant de croire que les forces du bien, la pureté de la parole divine finissent toujours par l’emporter. Rabbin Claude BRAHAMI, op. cit.

[2] - Actes des Apôtres XI 1 à 18 ; psaume XLII ; évangile selon saint Jean X 1 à 10

dimanche 29 avril 2012

qu'ils le disent, ceux qui craignent le Seigneur - textes du jour

Dimanche 29 Avril 2012

Prier… pluie et silence, un robinet d’évier goutte mais les cadences tombant du toit l’étouffes. Notre fille aime cette goutte, est-ce signe et rumeur de la vie dans notre cuisine fraîhement meublée… Prier pour notre pays, responsabilité qu’ont les Français, que nous avons de notre pays et de notre société, responsabilité qu’une France assurée et consciente d’elle-même ce qui n’a rien à voir avec les conjonctures et les dénoires économiques d’aujourd’hui, les désastres militaires d’hier ou d’autrefois, l’assurance et la conscience d’être soi et d’avoir encore plus d’avenir que de passé, et d’avoir tant à faire chez soi et pour le reste du monde, avec nos voisins à chérir, oui… nos semblables et notre rappel permanent à la réalité qu’est la diversité. Et son nom, donné aux hommes, est le seul qui puisse nous sauver. La conclusion de Pierre justifie le fameux en dehors de lui, il n’y a pas de salut, assertion fondant totalitarisme et persécutions. Une proposition, une voie de salut, un moyen, une référence, l’indication d’une Personne, de Dieu, nullement un signe de guerre ou un supériorité. Car même le croyant ici-bas est autant dénué de foi que l’incrédule, il ne détient rien, il n’est pas même favorisé, il est seulement – s’il le peut – les mains ouvertes et disponible à Dieu, qui souverainement fait le reste, et sait… on nous demande comment cet homme a été sauvé. Sachez-le donc, vous tous, ainsi que tout le peuple d’Israël : c’est grâce au nom de Jésus le Nazaréen, crucifié par vous, ressuscité par Dieu, c’est grâce à lui que cet homme se trouve là devant vous, guéri. [1] Puissance et rôle que revendique explicitement le Christ : je suis le bon pasteur, le vrai berger. Le vrai berger donne sa vie pour ses brebis. Et bien plus fort que toute supériorité théologique ou pastorale de l’Eglise sur le temporel ou sur la diversité des croyances et religions autres que sa propre annonce, l’ambition de communion : il y aura un seu troupeau et un seul pasteur. Par quelle opération, par la passion, la mort et la résurrection du Seigneur. Le Père m’aime parce que je donne ma vie, pour la reoprendre ensuite. Personne n’a pu me l’enlever : je la donne de moi-même. J’ai le pouvoir de la donner, et le pouvoir de la reprendre : voilà le commandement que j’ai reçu de mon Père. L’obéissance donne le pouvoir. La rédemption, la mort sont un don, une liberté, la liberté de Dieu en acte. Dieu est maître de liberté, bien moins parce qu’il nous la confrère à nous ses créatures, mais parce qu’Il est lui-même liberté. Voyez comme il est grand, l’amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes.


[1] - Actes des Apôtres IV 8 à 12 ; psaume CXVIII ; 1ère lettre de Jean III 1.2 ; évangile selon saint Jean X 11 à 18

samedi 28 avril 2012

déclaration du Conseil permanent de la Conférence des évêques de France en vue des élections - 3 Octobre 2011

Politique - 03 octobre 2011

Élections : un vote pour quelle société ?

Durant les prochains mois, notre attention sera largement sollicitée par la préparation des élections présidentielles et législatives.


Ces temps que nous traversons sont des temps de crise. Une crise globale touche tous les pays occidentaux depuis plusieurs dizaines d'années. Ce n'est pas une particularité française. Les effets de la crise financière mondiale qui s'est accélérée en septembre 2008 sont loin d'être épuisés. Ce déséquilibre s'est ajouté aux difficultés sociales et politiques qui sont les conséquences de la transformation profonde et rapide de nos sociétés et de toutes les structures qui organisent notre vie sociale.


De nombreux facteurs de transformation se conjuguent.

Trois d'entre eux méritent, selon nous, de retenir l'attention de tous :

- Tout d'abord, nous pensons au formidable développement des techniques scientifiques. Celui-ci ne cesse de se poursuivre. Il incite à projeter ou même à mettre à exécution des idées qui étaient restées jusque-là au stade des rêves ou des cauchemars. Ainsi le perfectionnement de la connaissance et de la compréhension du vivant suscitent des désirs que rien ne paraît pouvoir limiter. Il est donc urgent et indispensable que l'homme puisse mieux définir qui il est, et déterminer les conditions de son propre respect. Faute d'une appréhension précise de sa dignité, il se laisse inexorablement fasciner par son pouvoir scientifique, dont il est tenté d'attendre la solution à tous ses problèmes, en oubliant de voir ce qui risque de se retourner contre lui.


- Un deuxième facteur de transformation est la fin d'une certaine homogénéité culturelle de nos sociétés. Bien avant que la réalité de la mondialisation soit appréhendée et commentée, nos pays d'Europe occidentale ont connu - et connaissent encore - des vagues d'immigration diverses. Ainsi coexistent aujourd'hui, à égalité de droits, des personnes ayant des origines ethniques et des références culturelles et religieuses les plus variées. Pour des citoyens de plus ou moins vieille souche, ceci peut engendrer un sentiment d'instabilité très délicat à vivre. Pour beaucoup de nouveaux arrivés, cela se traduit par le fait de se sentir mal accueillis et de ne pas pouvoir trouver une place dans une société qu'ils ne peuvent pourtant plus quitter.


- Enfin, dans nos sociétés, chacun revendique toujours plus ses droits sans beaucoup s'inquiéter de ses devoirs. Dans ce domaine, nous assistons sans doute à un mouvement amorcé depuis longtemps. Les libertés individuelles ont contribué à augmenter le sens de la responsabilité personnelle. Mais l'individualisme finit par dissoudre la vie sociale, dès lors que chacun juge toute chose en fonction de son intérêt propre. Le bien commun de tous risque d'être confondu avec la somme des avantages particuliers.


Ces transformations interrogent la conception que l'on se fait de l'homme, de sa dignité et de sa vocation. Les gouvernants et les législateurs sont confrontés à des questions nouvelles. L'éclatement des références éthiques fait reposer un poids moral toujours plus lourd sur la formulation des lois. Puisqu'elles jouent inévitablement un rôle de référence morale dont il convient de tenir compte, le législateur ne peut se contenter d'enregistrer 'évolution des mœurs.


Dans ce contexte, notre devoir d'évêques est de rappeler la haute importance que l'Église, depuis ses origines, reconnaît à la fonction politique. Dans une démocratie représentative, le vote est la manière par laquelle chacun peut participer à l'exercice du pouvoir. Il est donc essentiel d'y prendre part, de la manière la plus sérieuse possible. Un vote ne peut être simplement dicté par l'habitude, par l'appartenance à une classe sociale ou par la poursuite intérêts particuliers. Il doit prendre en compte les défis qui se présentent et viser ce qui pourra rendre notre pays plus agréable à vivre et plus humain pour tous.
Comme chrétiens, nous devons être confiants : les crises qui traversent les sociétés humaines peuvent être des occasions de renouveau et des expériences qui réorientent l'avenir. Elles ne doivent pas nous empêcher de viser toujours et en toutes circonstances le respect de la dignité de toute personne humaine, l'attention particulière aux plus faibles, le développement des coopérations avec d'autres pays, et la recherche de la justice et de la paix pour tous les peuples.


Cependant, nous ne pouvons pas attendre du pouvoir politique plus qu'il ne peut donner. Élire un président de la République et choisir des représentants ne suffira pas à relever les défis qui se présentent à nous aujourd'hui. Les déséquilibres actuels, avec leurs dimensions sociales, culturelles et économiques, nous font mesurer l'apport considérable de la production industrielle et de la société de consommation, mais aussi leurs limites et leurs fragilités. Le mode de vie qui est le nôtre depuis quelques décennies ne pourra pas être celui de tous les pays du monde, ni même se maintenir perpétuellement tel quel chez nous.


Depuis longtemps, avec d'autres, les papes et les évêques appellent chacun à reconsidérer sa manière de vivre, à privilégier l'être plus que l'avoir, à chercher et promouvoir un « développement intégral » pour tous. Sous des termes variés, c'est la même invitation pressante à un changement de mode de vie. Chrétiens, à bien des égards, nous sommes mieux équipés que beaucoup d'autres pour choisir ce changement plutôt que de le subir seulement.

À cette lettre, nous joignons un document qui détaille quelques points qui nous semblent importants à prendre en compte en vue de ces élections. À chaque citoyen, à chacun de vous donc, il revient d'examiner comment les programmes et les projets des partis et des candidats traitent ces différents points, et de déterminer si ces approches sont cohérentes ou non avec la société dans laquelle nous voulons vivre. À chacun de vous il reviendra aussi de hiérarchiser ces différents points en vue du vote. D'autres, bien sûr, peuvent y être ajoutés.


Dans un temps d'hypermédiatisation, il convient d'être prudent devant la surenchère des informations qui seront diffusées, de ne pas se laisser entraîner par des calomnies ou des médisances, de rechercher avec précaution, autant que chacun en est capable, ce qui est vrai et ce qui est juste.


En vous adressant ce message en amont de l'ouverture de la campagne électorale, nous croyons répondre à l'attente de beaucoup. Prions pour que le désir du bien de tous domine dans nos choix et dans ceux de nos concitoyens.


Paris, le 3 octobre 2011



Cardinal ANDRÉ VINGT-TROIS,
archevêque de Paris
président de la Conférence des évêques de France

Mgr HIPPOLYTE SIMON,
archevêque de Clermont
vice-président de la Conférence des évêques de France

Mgr LAURENT ULRICH,
archevêque de Lille
vice-président de la Conférence des évêques de France

Mgr JACQUES BLAQUART,
évêque d'Orléans

Mgr JEAN-CLAUDE BOULANGER,
évêque de Bayeux et Lisieux

Mgr JEAN-PIERRE GRALLET,
archevêque de Strasbourg

Mgr HUBERT HERBRETEAU,
évêque d'Agen

Mgr JEAN-PAUL JAEGER,
évêque d'Arras

Mgr JEAN-PAUL JAMES,
évêque de Nantes

 
Evêque placé à la tête d'une province ecclésiastique.Les cardinaux sont les premiers collaborateurs du papeEnsemble des évêques de France.Organisme qui reçoit délégation de l'Assemblée plénière des évêques.
CONFÉRENCE DES ÉVÊQUES DE FRANCE
Élections 2012
Éléments de discernement
De sa contemplation du Christ, l'Église tire une vision cohérente de la personne en toutes ses dimensions, inséparables les unes des autres. Cette vision peut servir de guide et de mesure aux projets qu'une société doit se donner.


 
Vie naissante
Chaque personne est unique aux yeux de Dieu. L'engagement résolu des chrétiens n'est pas dicté d'abord par une morale mais par l'amour de la vie que ni la maladie ni l'âge ne peut amoindrir. Il est impératif que les autorités publiques refusent l'instrumentalisation de l'embryon. De même, l'avortement ne peut en aucun cas être présenté comme une solution pour les mères en difficulté. Les chrétiens doivent veiller à ce que la société consacre de grands efforts pour l'accueil de la vie.
 
 
Famille
En créant l'être humain, « homme et femme », Dieu a suscité une relation de complémentarité à la fois biologique et sociale qui se retrouve dans toute la société. La différence sexuelle de l'homme et de la femme est fondatrice et structurante de tout le devenir humain. De plus, l'union de l'homme et de la femme scellée dans le mariage est le moyen le plus simple et le plus efficace d'accompagner le renouvellement des générations et d'accueillir les enfants pour les introduire en ce monde. La famille, fondée sur l'union durable de l'homme et de la femme, doit être aidée économiquement et défendue socialement car, à travers les enfants qu'elle porte et qu'elle éduque, c'est l'avenir et la stabilité de la société qui sont en jeu.

 
Alliance d'un homme et d'une femme dans les conditions prévues par la loi.
Education
L'éducation est une des expressions majeures du respect de la personne. Une éducation juste implique : la liberté et la responsabilité des parents, la transmission à tous des savoirs essentiels, l'attention spécifique à ceux qui rencontrent des difficultés scolaires, le respect de la liberté de conscience, des enseignements respectueux de la dignité et de la beauté de la vie humaine.

 
Jeunesse
L'intégration des jeunes générations est un objectif incontournable pour toute société. Chez nous, divers facteurs rendent cette intégration difficile. L'aide aux familles dans leur responsabilité éducative, les conditions de la vie étudiante, l'entrée dans la vie professionnelle, la possibilité de fonder une famille indépendante, etc. sont autant de domaines dans lesquels le soutien institutionnel et financier de la collectivité ne doit pas être perçu comme une faveur, mais comme un investissement nécessaire à la cohésion et à la paix sociales.

 
Banlieues et cités
Depuis quelques années, malgré des efforts répétés, certains quartiers et certaines cités deviennent des lieux de violence, de trafics. Plus généralement, certains de leurs habitants s'y trouvent enfermés, ne parvenant pas et parfois ne voulant plus prendre pied dans la société globale. Une politique purement répressive ne saurait suffire ni résoudre les problèmes de fond. Des efforts d'aménagement, notamment de renouvellement de l'habitat et des transports, sont nécessaires. Des initiatives doivent être prises pour aider les habitants à comprendre la société où ils se trouvent et à s'en considérer comme partie prenante. Un certain nombre d'associations jouent un rôle important qui doit être soutenu et encouragé.

 
Environnement
La terre est un don d'amour fait par le Créateur pour que l'homme soit le gérant de ce bien donné. En l'invitant à dominer la terre, Dieu ne l'a pas invité à l'épuiser ou à la détruire. C'est pourquoi l'Église invite la société à promouvoir des modes de vie respectueux de l'environnement et à intégrer cette préoccupation dans le développement économique et social. Les prouesses techniques dont la société est capable sont à encourager si elles sont respectueuses de l'« écologie humaine » (Benoît XVI).

 
Economie et justice
Le travail demeure une nécessité fondamentale pour la structuration de la personne. C'est pourquoi l'objectif de toute politique économique doit être d'offrir à tous ceux qui se présentent, et en particulier aux jeunes, une perspective de travail et une véritable préparation à l'emploi. Une politique économique qui se résoudrait au maintien dans la dépendance vis-à-vis de l'État serait contraire à cet impératif. Les autorités publiques doivent créer les conditions d'une plus grande justice dans la vie économique en veillant à l'équité des salaires, des prix et des échanges. L'équilibre de la société exige la correction des écarts disproportionnés de richesse.


Mais la société ne se limite pas aux échanges économiques. La gratuité qui est à l'œuvre dans la vie associative et culturelle est une des conditions de sa vitalité. L'État doit encourager et faciliter les citoyens à s'engager financièrement et personnellement dans des associations de tous ordres qui renforcent le tissu social.

 
Coopération internationale et immigration
Le bien commun implique la paix entre personnes et entre nations. Il proscrit l'usage de la force entre les États, sauf dans les situations extrêmes où toute autre solution est impossible. Il appelle un partage des richesses et le développement des actions de coopération. Il passe par des institutions internationales dont le fonctionnement et les actions servent efficacement la dignité des personnes et des peuples.
L'Église reconnaît à tout homme le droit d'émigrer pour améliorer sa situation, même s'il est regrettable que tous ne puissent pas survivre dans leurs pays.
Mais dans un monde aussi organisé que le nôtre, une régulation des migrations est nécessaire. Elle ne peut pas se réduire à une fermeture protectrice des frontières. Elle doit permettre d'accueillir au mieux ceux qui se présentent, avec respect et sérieux, et en leur offrant une vraie possibilité d'intégration.

 
Handicap
Nos sociétés modernes s'honorent d'un renouvellement du regard sur les personnes handicapées. Elles savent leur permettre de trouver leur place dans la vie sociale. Les chrétiens y reconnaissent volontiers un écho de l'attitude du Christ rencontrant et réconfortant des personnes malades ou atteintes de handicap (Marc 1, 40 ; Luc 5, 17...). Ce souci doit donc être encouragé. Mais le dépistage prénatal systématique qui risque de déboucher sur l'élimination des personnes porteuses de certains handicaps remet en cause en son fondement même la solidarité envers le plus faible qui doit animer la société.

 
Fin de Vie
Toute personne, quel que soit son âge, son état de fatigue, son handicap ou sa maladie, n'en garde pas moins sa dignité. Pour cette raison, « l'euthanasie est une fausse solution au drame de la souffrance, une solution indigne de l'homme » (Benoît XVI) car elle vise, sous prétexte de compassion, à abandonner les personnes au moment où elles ont le plus besoin d'aide et d'accompagnement. L'arrivée de générations importantes dans le grand âge doit inviter la société à une plus grande solidarité. Le développement des soins palliatifs, fruit d'un progrès éthique et scientifique, doit être poursuivi pour que tous ceux qui en ont besoin puissent en bénéficier.

 
Patrimoine et culture
Notre pays hérite de l'effort culturel des générations précédentes. La culture ne coïncide pas avec la production culturelle ou même avec la réception de ses produits. Elle permet à chaque personne d'inscrire sa destinée dans la communauté humaine avec celle des autres devant les horizons de la plus grande espérance. Il est souhaitable que les pouvoirs publics assemblent les conditions pour que les jeunes générations profitent de ce que nous lègue le passé pour se projeter dans l'avenir.

 
Confiance dans les promesses du Christ.
Europe
Le projet européen peut être compris de bien des manières. En son origine, il représente un magnifique effort pour assumer l'histoire d'un continent en termes de pardon et de promesse. Dans le monde globalisé où nous vivons, bien des réalités ne peuvent être traitées qu'à cette échelle. Mais la construction
européenne appelle des États capables de proposer et de défendre un projet clair, en vue de créer un espace de liberté et de créativité.


L'Union européenne est devenue le cadre institutionnel de beaucoup des activités humaines en notre pays. Mais elle agit trop souvent comme une instance administrative et même bureaucratique. Le marché unique est un beau projet dans la mesure où il est sous-tendu par une vision spirituelle de l'homme. Les chrétiens désirent que l'Europe, loin de réduire l'homme à n'être qu'un consommateur sans cesse insatisfait et soucieux de ses droits, permette à ses habitants d'agir de façon responsable, avec les ressources spirituelles, morales, économiques et politiques qui sont les leurs, pour le bien de l'ensemble du monde.

 
Laïcité et vie en société
Dans notre pays, la relation entre l'Église catholique et l'État a été marquée par une histoire difficile et souvent conflictuelle. Cette relation est aujourd'hui largement apaisée et c'est une bonne chose pour l'équilibre de notre société. Nous vivons dans un régime de séparation - depuis la loi de 1905 - et la laïcité est un principe constitutionnel de la République française. À plusieurs reprises et notamment lors du centenaire de la loi de 1905 [1], l'Église a affirmé accepter le cadre dans lequel nous nous situons. Séparation ne signifie pas ignorance réciproque ; nombreux sont les lieux et les occasions de rencontre, de dialogue, tant au plan local que national. Si l'État ne reconnaît ni ne subventionne aucun culte (art. 2 de la loi de 1905), il se doit d'assurer la liberté de conscience et de garantir le libre exercice des cultes (art. 1). C'est dans le sens de la liberté que la jurisprudence a de façon constante interprété la loi. Récemment le débat sur la laïcité est revenu sur le devant de la scène, en raison de la présence plus nombreuse de citoyens de religion musulmane et des questions posées par certaines pratiques minoritaires. Ces débats ne doivent pas stigmatiser les religions dans notre pays au risque d'aboutir à la laïcité la plus fermée, c'est-à-dire celle du refus de toute expression religieuse publique. Certaines pratiques administratives ont montré que ce risque n'est pas illusoire.


De même, certaines réactions excessives, dans des débats récents, ont montré que l'intolérance à l'égard de l'Église catholique (et des religions en général) ne constituait pas uniquement des vestiges du passé. Les catholiques n'entendent pas être des citoyens interdits de parole dans la société démocratique.
En exprimant ce qu'ils pensent, ils ne vont pas à l'encontre de l'intelligence et de la liberté de jugement de ceux qui ne partagent pas leur foi. Ils souhaitent une application apaisée et ouverte des lois et des règlements qui définissent le pacte laïc de notre commune République.
 
 

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Pour aller plus loin
Les questions sociales, économiques et éthiques sont de plus en plus en plus complexes. Les experts ont une parole qui peut aider à la réflexion des citoyens mais ne peut pas s'y substituer.


L'éducation de la conscience, par le dialogue raisonné de la foi, est donc un impératif pour tout croyant s'il ne veut pas en rester à quelques formules toutes faites. Il est invité par l'Église à découvrir la richesse de son enseignement, jalonné par les encycliques des papes et récapitulé dans le Catéchisme de l'Église catholique, qui concerne l'homme tout entier.


«Beaucoup de comportements cyniques ou simplement irréfléchis ont conduit à la perte du sens d'une destinée commune, à commencer par l'affirmation selon laquelle chacun n'a de comptes à rendre qu'à lui-même en oubliant que les droits n'ont de sens qu'en lien avec des responsabilités [...] lorsque le sens de l'existence ne passe plus par le lien à autrui, la perception même de l'intérêt général est brouillée. Les propositions politiques de long terme sont dévalorisées. Les attentes des citoyens s'en trouvent faussées.
Il n'y a plus de hiérarchie des priorités et chacun réclame l'intervention de l'État pour ses problèmes particuliers ».
[2]

Si « l'Église ne peut ni ne doit prendre en main la bataille politique pour édifier une société la plus juste possible [...], elle ne peut ni ne doit non plus rester à l'écart dans la lutte pour la justice. Elle doit s'insérer en elle par la voie de l'argumentation rationnelle et elle doit réveiller les forces spirituelles, sans lesquelles la justice, qui requiert aussi des renoncements, ne peut s'affirmer ni se développer ». [3]


Le véritable développement humain suppose « des hommes droits, des acteurs économiques et des hommes politiques fortement interpellés dans leur conscience par le souci du bien commun. La compétence professionnelle et la cohérence morale sont nécessaires l'une et l'autre ! ». [4]


« La crise couvait depuis longtemps. Elle s'est manifestée d'abord dans le domaine écologique. Puis les crises alimentaire, financière, économique, monétaire et sociale se sont succédées rapidement, révélant une crise bien plus profonde, une crise spirituelle, une crise de sens. Cette crise du sens profond de l'existence a été masquée par une confiance excessive dans l'économie libérale. Il est clair aujourd'hui que l'économie seule ne peut fournir les réponses adéquates à tous les problèmes de société » [5]


« On voudrait être convaincu que les dérives financières de 2008 n'ont pas été oubliées et que les événements qui les ont provoquées n'ont pas repris leurs cours. Les contrôles réels des flux financiers, au niveau national et international, peinent à se mettre en place. L'illusion d'une grande distribution des fonds publics continue de masquer les failles structurelles de notre pays et contribue à prolonger le rêve d'une société de consommation sans rapport réel avec les moyens disponibles, ni dans les foyers ni dans la société. L'appel que nous lançons régulièrement à promouvoir de nouveaux modes de vie n'est pas une incantation moralisante. C'est plutôt l'avertissement que la raison humaine doit lancer devant les excès de notre système ». [6]


Une redéfinition du bien commun est sans doute nécessaire. « Il appartient à chacun d'intégrer que ses envies personnelles ne peuvent être l'unique ressort de son agir et de son jugement. Il est fort possible que la prise en compte du bien commun demande des sacrifices à chacun ». [7]


« Aucun pays ne peut penser être en mesure de faire face seul aux problèmes migratoires de notre temps. Nous sommes tous témoins du poids de souffrances, de malaises, et d'aspirations qui accompagnent les flux migratoires. [...] les travailleurs étrangers, malgré les difficultés liées à leur intégration apportent par leur travail une contribution appréciable au développement économique du pays qui les accueille, mais aussi à leur pays d'origine par leur envoi d'argent. Il est évident que ces travailleurs ne doivent pas être considérés comme une marchandise ou simplement comme une force de travail [...]. Tout migrant est une personne humaine qui, en tant que telle, possède des droits fondamentaux inaliénables qui doivent être respectés par tous et en toute circonstance ». [8]


[1] Jean-Paul II, Lettre aux évêques de France, février 2005. Déclaration des évêques de France. Assemblée plénière, juin 2005.
[2] CONFÉRENCE DES ÉVÊQUES DE FRANCE, CONSEIL FAMILLE ET SOCIÉTÉ, Grandir dans la crise, coéd. Bayard/Cerf/ Fleurus-Mame, coll. Documents d'Église, mars 2011, page 18-19.
[3] BENOÎT XVI, Deus caritas est, n° 28, 2006.
[4] BENOÎT XVI, Caritas in veritate, n° 71, 2009.
[5] IBID., Grandir dans la crise, page 29.
[6] Cal ANDRÉ VINGT-TROIS, Discours d'ouverture, Assemblée plénière, Lourdes 2011.
[7] IBID., Grandir dans la crise, page 47.
[8] BENOÎT XVI, Caritas in veritate, n° 62, 2009.
Organe d'expression de la Conférence des évêques de France.Ensemble des évêques de France.Lettre solennelle du Pape adressée à l'Eglise catholique.
Références bibliographiques
Vatican II, Constitution pastorale sur l'Église dans le monde de ce temps, Gaudium et spes, décembre 1965.
Catéchisme de l'Église catholique, coéd. Centurion/Cerf/Fleurus-Mame, paragraphes 2196 à 2463, 1998.
• Conseil pontifical Justice et Paix, Compendium de la doctrine sociale de l'Église, coéd. Bayard/Cerf/Fleurus-Mame, décembre 2005.
• BENOÎT XVI, L'Amour dans la vérité.
CONFÉRENCE DES ÉVÊQUES DE FRANCE, Conseil Famille et Société, Grandir dans la crise, coéd. Bayard/Cerf/Fleurus-Mame, coll. Documents d'Église, mars 2011

il en coûte au Seigneur de voir mourir les siens - textes du jour

Samedi 28 Avril 2012

Eveillé depuis une heure. – Signal d’éveil des oiseaux presque en fanfare, puis recto tono discret. Ciel sans lumière, flou.
Culpabilité… il s’est confié à moi tandis que nous camionnions des éléments de cuisine qu’il se chargeait de monter chez nous, la route est déjà un projet commun, nous décentrant et nous permettant de communiquer, de nous dire, bien le contraire de nous abandonner mais être avec nous-même utilement par le partage avec autrui. Couple aimant, stable, comblé d’enfants, beaux chacun, mais il se reproche de ne pas répondre assez à l’amour et à la demande de sa femme, simplement parce qu’introverti, s’exprimant peu, il n’a pas les paroles, les gestes et les caresses qu’elle demande. Je vais essayer de lui dire : tout simplement en vous en dormant ou en vous éveillant, posez la main sur sa hanche à votre côté. Ou dites-lui, d’une phrase, ce que vous venez de me dire… Notre fille étreint sa mère, mais celle-ci tient une bouteille d’eau de Javel, craint pour son gilet de laine auquel elle tient, elle s’emporte, comme parfois, effondrement de Marguerite qui ne l’a évidemment pas fait exprès, elle se persuade que sa mère la gronde, ne veut que la gronder. Désespoir… à la cantonade, je demande à ma chère femme de consoler notre fille qui répète que sa mère ne veut pas la consoler mais la gronder. Trouvaille : je veux une punition. Donne-moi une punition, je l’assure qu’elle n’a pas à être punie. Réminiscence d’un dessin animé, fort bien fait d’image mais complexe et paternaliste de suggestions des comportements, un couple genre Quaker dans la « deep America » fait internat pour quelques enfants, l’un ment, l’enseignant lui dit qu’enfant il lui arrivait aussi de mentir et qu’il fut puni d’une manière qu’il n’a plus jamais menti. La punition sera que… l’enfant lui donnera à lui l’enseignant un coup de latte, le plus fort possible chaque fois que lui, l’enfant, aura menti. La pire punition est la conscience d’avoir fait souffrir autrui… Je ne conclus pas. – Sollicité sans cesse par le « milieu chrétien », je n’ai pas de mal à séparer foi et politique, mais cet acharnement pose question, celle de la loi et celle du comportement individuel. Je reçois aussi ces réactions ou ces inclinations en faveur du président sortant, motivations diverses mais surtout instinct soit positivement pour lui soit par hostilité à son compétiteur. Je vis cette campagne au second degré. Si les Français sont directement interrogés, peu se dérobent pour admettre que l’échéance est sérieuse. Mais elle l’est chaque fois. La relation de la personne au collectif, sans qu’il y ait repli sur le groupe, nous la formulons chacun idéalement, mais la pratique, et plus encore une vivante institutionnalisation est difficile. – Révélation géniale, rien que du point de vue sociologique et psychologique, que le Corps mystique et la communion des saints. Ce n’est pas une déduction des évangiles, c’est une invitation positive du Christ par le sacrement de la chair et du sang. Nous sommes avides de cette solidarité et de cette union à tous, mais nous ne pouvons pas ne pas partir de nous-mêmes, et nous-mêmes nous nous vivons divisés entre nos astreintes physiques et psychologiques, nos limites et le tréfonds de nous-mêmes, entre l’enveloppe de notre corps, de notre histoire, de notre constitution mentale dont nous sommes en partie responsables et comptables, et cette âme, ce visage que nous avons de nous-mêmes au possible et qui est sans doute la manière dont Dieu nous veut et nous regarde, mais quelle distance. Or, c’est la conscience de cette distance qui nous fait aller à Dieu.
Prier… [1]  « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ». Beaucoup de ses disciples, qui avaient entendu, s’écrièrent : « Ce qu’il dit là n’est pas tolérable, on ne peut pas continuer à l’écouter ! ». Même réaction que les Grecs, plus tard, sur l’Aréopage, entendant Paul qui ne leur déplaisait pas et les avait même flattés, évoquer la Résurection du Christ. Quand Jésus, l’Eglise (ses mandements sur la morale éthique) viennent au fait, nous nous récrions, la sagesse ne dérange pas, les miracles satisfont, mais la réalité ? un tel dépaysement… Significativement, le pain de vie ne sera pas à charge dans le procès du Messie. Souveraineté du Christ qui souvent dans les évangiles est présenté comme lisant dans l’esprit de ses auditeurs ou contradicteurs. Jésus connaissait par lui-même ces récriminations des disciples. Il leur dit : « cela vous heurte ? Et quand vous verrez le Fils de l’homme monter là où il était auparavant ? … C’est l’Esprit qui fait vivre, la chair n’est capables de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et elles sont vie. Mais il y en a parmi vous qui ne croient pas ». Le vocabulaire et les concepts humains sont défaillants pour décrire, embrasser la totalité de la réalité : Dieu-même. Jésus, Dieu fait homme, pour nous révéler, autant qu’il nous est possible de le recevoir, porte au sommet le dire et l’intelligence de l’homme, mais ces énoncés sont fantastiques. Le seuil ne peut être franchi ni en logique ni en sagesse, le saut est la foi. Il n’est pas sans conséquence. Jésus savait en effet depuis le commencement qui étaient ceux qui ne croyaient pas, et celui qui le livrerait. En regard, l’Eglise – Pierre, pécheur, renégat, relaps, mais croyant – fait profession de foi : tu as les paroles de la vie éternelle. Quant à nous, nous croyons, et nous savons que tu le Saint, le Saint de Dieu. Le même Pierre au paralysé : Eneas, Jésus-Christ te guérit, lève-toi et fais ton lit toi-même… Et aussitôt il se leva … Pierre fit sortir tout le monde, se mit à genoux et pria, puis il se tourna vers le corps et il dit : Lève-toi… elle ouvrit les yeux et, voyant Pierre, elle se redressa et s’assit. Pierre lui donnant la main, la fit se lever. Exactement les instructions de Jésus à l’instant de cette Ascension qu’il avait évoquée pour les incrédules… guérir, ressusciter sont des ordres autant qu’un pouvoir, le pouvoir de la foi. Il en coûte au Seigneur de voir mourir les siens ! [2]


[1] - Actes des Apôtres IX 31 à 43 ; psaume CXVI ; évangile selon saint Jean VI 60 à 69

[2] - Comme dans le cas précédent, ce psaume a été divisé en deux parties pour les mêmes besoins liturgiques. Notre psaume nous semble un peu décousu, mais son sens est clair. Il s’agit d’un homme qui se trouve dans une situation difficile, proche de la mort et qui demande à Dieu de l’en délivrer ; il fait alors le vœu d’offrir un sacrifice dans le temple au sein de Jérusalem, en présence de tout le peuple. Comme dans les autres psaumes, aucune précision n’est apportée quant à la nature de ces souffrances ni à l’époque où se déroulent ces événements, afin que puisse s’y reconnaître quiconque se trouve dans la détresse ; de même que dans ce psaume l’auteur prie pour lui-même en s’incluant dans l’ensemble du peuple d’Israël, quiconque a besoin du secours divin doit se solidariser evc ses frères. Sur l’expression ahavti ki ychma’ ha chem = « j’aime l’Eternel quand il me répond », le midrach nous dit que Dieu, touché par cette décaration, répond que lui aussi aime Israël (Deut. 7.13) « il t’aime, te bénit et te multiplie » Rabbin Claude BRAHAMI, op. cit.


vendredi 27 avril 2012

qui es-tu, Seigneur ? - textes du jour

Vendredi 27 Avril 2012

Prier… [1] Analogie des deux récits, la discussion sur le pain de vie, le Christ chair en nourriture, et la conversion de Saul devenu Paul sur la route de Damas. Dans les deux cas, aucune progressivité, nous passons de l’un à l’autre. Saul était toujours animé d’une rage meurtrière contre les disciples du Seigneur… et, sans plus attendre, il proclamait Jésus dans les synagogues, affirmant qu’il est le Fils de Dieu. Cause de la crispation initiale : s’agissant du futur Paul, elle n’est pas dite, mais le dialogue avec Jésus lui apparaissant peut éclairer : Saul, Saul, pourquoi me persécuter ? – Qui es-tu, Seigneur ? – Je suis Jésus, celui que tu persécutes. Ignorance du sens de ce que l’on fait ? Paul passe d’une appréhension des disciples, témoins du Christ, donc d’intermédiaires, à la personne en question : le Fils de Dieu. Jésus ne s’identifie pas comme tel, il entre dans la situation et le parcours de Paul : je suis celui que tu… Et c’est aussi une relation nouvelle, souveraineté aimante du Christ, disponibilité de son nouvel et décisif Apôtre : relève-toi et entre dans la vie : on te dira ce que dois faire. Il est recruté. Il ne donne ni avis, ni consentement, d’une certaine manière, il est en continuité avec lui-même. Son tempérament ardent se consacre aux véritables objectifs.  Qu’en est-il des Juifs venant d’écouter, non pas un déclinatoire d’identité, mais une révélation stupéfiante à laquelle l’Ancien Testament n’a pas explicitement préparé. La symbolique du pain et du vin, la chqir et le sang, puis la mémoire et la transusbtantation, décisive fonction sacramentelle de l’Eglise ne sont pas, sauf lacune de ma part, pressenties dans l’Ancien Testament : à chercher cependant, si peu que ce soit. Dans l’Ecriture, ce n’est pas l’explicite ou la répétition qui décident de notre foi, mais parfois un seul mot : la mise en relation du croyant, de la bonne volonté avec cette ouverture de chemin à Dieu importe bien davantage. Elle seule d’ailleurs, l’exégèse ne convertit pas et la puissance ou l’émotion littéraires ne nous disposent pas forcément. Comment cet homme-là peut-il nous donner sa chair à manger ? Jésus répond-il ? Dialogue aussi avec Nicodème, voire enfin celui de Marie répliquant à l’ange Gabriel. Comment ? Jésus ne répond pas, mais il dit les conséquences de la foi, il donne l’enjeu de croire, la réponse c’est nous qui l’avons, adhésion ou pas. Le sens n’est pas d’ordre logique, intellectuel, démonstratif. Il n’est pas l’exercice concluant d’une ou de plusieurs de nos facultés. Il est, comme sur la route de Damas, l’entrée en possession mutuelle de l’homme avec Dieu. Tel est le pain qui descend du ciel : il n’est pas comme celui que vos pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. … Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, le ressusciterai au dernier jour. … de même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même aussi celui qui me mangera vivra par moi. Enseignement forcément de la Trinité, présente aussi dans la conversion de Saul : tu seras rempli de l’Esprit Saint. Le baptême et la résurrection ne font qu’un : tu vas retrouver la vue… je le ressusciterai. Conclusion du psalmiste : son amour envers nous s’est montré le plus fort. [2]


[1] - Actes des Apôtres IX 1 à 20 ; psaume CXVII ; évangile selon saint Jean VI 52 à 59

[2] - On peut s’étonner d’un psaume si court, le plus court du psautier. Certains exégètes pensent qu’il forme la conclusion du psaume précédent ou l’introduction au psaume suivant. Il constitue en effet une transition entre la première partie du halel qui commence et se tremine par halélouya, et la deuxième partie, composée de l’unique psaume 118. Le Redaqe(Rabbi David Qimhi 1160-1235, grammairien et exégète de Narbonne) explique la brièveteé de ce psaume : il nous transporte à l’époque messianique où toutes les nations reconnaîtront Dieu, sa vérité et son bienfait. Il n’y aura rien à ajouter ! Rabbin Claude BRAHAMI, op. cit.

jeudi 26 avril 2012

personne ne peut venir à moi, si ... - textes du jour

Jeudi 26 Avril 2012

Prier… [1] ma vie et tous, nos œuvres et nos amours, nos défauts et nos lacunes à toutes et à tous, devant toi, Seigneur. Venez et voyez les hauts faits de Dieu. Béni soit Dieu qui n’a pas écarté ma prière ni détourné de moi son amour. [2] Le principal, le décisif est celui accompli par le Fils. Personne ne peut venir àmoi si le Père qui m’a envoyé ne l’attire vers moi (voilà qui décide les vocations, les conversions, la conduite de toute vie, jusqu’au plus intime de notre âme et dans le quotidien le plus banal) et moi, je le ressusciterai au dernier jour. La totalité de notre être, de notre personnalité y compris nos affections et notre parcours dans nos dimensions actuelles, précaires certes mais nôtres, et déjà éclairé du sourire et parfois de l’humour de Dieu, constamment de sa sollicitude et de sa prévoyance, de la connaissance qu’il a de chacun de nous, surpassant et de loin notre pauvre et si limitée conscience de nous-mêmes. Enigme ? ou disponibilité merveilleuse ? fondement de la vie sacramentelle pour le chrétien, pour le croyant : moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair donnée pour que le monde ait la vie. Dialogue d’une élite contemporaine du Christ avec un des disciples, un Ethiopien, un eunuque, haut fonctionnaire de Candace, reine d’Ethiopie, administrateur de tous ses trésors, un homme de bonne volonté et de culture puisque, revenant de Jérusalem (l’Ancien Testament), il lisait le prophète Isaïe. – Dis-moi, je te prie : de qui le prohète parle-tg-il ? De lui-même, ou bien d’un autre ? « Réédition » de la séquence d’Emmaüs, le converti en puissance est rejoint sur sa propre route par Philippe, qui prit la parole, et, à partir de ce passage de l’Ecriture, lui annonça la Bonne Nouvelle de Jésus… Quand ils furent remontés de l’eau, l’Esprit du Seigneur emporta Philippe ; l’eunuque ne le voyait plus, mais il poursuivait sa route, tout joyeux (Nouveau Testament). Venez, écoutez, vous tous qui craignez Dieu : je vous dirai ce qu’il a fait pour mon âme.   


[1] - Actes des Apôtres VIII 26 à 40 ; psaume LXVI ; évangile selon saint Jean VI 44 à 51

[2] - Ce psaume est tout entier un hymne à la gloire de Dieu. L’auteur invite la terre entière à chanter ses louanges. D’abord parce que c’est le créateur du monde, mais surtout parce qu’il oblige ses ennemis à le reconnaître et qu’il a accompli des miracles particulièrement éclatants, comme « l’assèchement de la mer » (la mer Rouge, au temps de Moïse) et le fleuve (au temps de Josué). Tous les peuples de la terre doivent lui rendre hommage car il a sauvé Israël de ses implacables ennemis qui l’ont persécuté sans répit. Pour cela, l’auteur offre des sacrifices et fait brûler de l’encens. Rabbin Claude BRAHAMI, op. cit.

mercredi 25 avril 2012

voter en chrétien ? deux correspondances



Je reçois – le lundi 23 – d’une amie le transfert d’une circulaire


----- Original Message -----
From:
Sent: Monday, April 23, 2012 11:00 AM
Subject: Tr : TR: Sarkozy et les chrétiens]


----- Mail transféré -----
De : Jean-Claude GILBERT
À :
Envoyé le : Dimanche 22 avril 2012 11h18
Objet : TR: Sarkozy et les chrétiens]

                Une bonne réflexion .

à méditer  avant notre décision du  22 avril ....


 " Une synthèse et un rappel d'un paroissien malouin , qui peuvent-être utiles ..... au milieu de tous les  messages contradictoires qui nous assaillent !" de la part d' un ami.
 Bonne lecture. 


Chers Amis,

 A l'approche des élections, je me permets de vous faire partager, dans le document joint à ce message, un petit exercice auquel je me suis astreint depuis 2010 : répertorier toutes les prises de position du président Sarkozy en faveur de l'identité chrétienne de notre pays, des valeurs chrétiennes en général et de tout ce qui va avec. Prenez svp 5 mn pour le parcourir : ce n'est pas long. Comme vous le constaterez vous-mêmes, quelle que soit l'absence de sympathie que peut inspirer la personnalité du chef de l'Etat actuel, quel que soit par ailleurs le jugement mitigé que l'on peut porter sur le bilan de sa politique économique et sociale, il est une réalité qu'il me semble impossible de nier, à moins de malhonnêteté intellectuelle : AUCUN autre président de la Vème République ne s'est engagé avec autant de conviction dans la défense de principes et de valeurs intimement liés à la religion chrétienne, comme Sarkozy l'a fait à Rome, à Vézelay ou à Domrémy. Aucun autre président ne s'est entremis aussi loin en faveur de la protection des chrétiens d'Orient. Aucun autre président, à ma connaissance, n'a osé inviter une dizaine de jeunes prêtres à l'Elysée la veille de Noël, en les encourageant à porter leur parole dans la société. Aucun président ne s'est opposé activement, comme l'a fait Sarkozy, à la légalisation de l'euthanasie, alors-même qu'une cinquantaine de personnalités de la "gauche-caviar" (A. Comte-Sponville, G. Bedos, N. Baye, B. Cyrulnik...) signaient un manifeste demandant aux candidats de s'engager "solennellement" en faveur d'une telle légalisation et que le candidat socialiste faisait publiquement sienne cette idée.  Certes, tout est loin d'être parfait. Certains diront que tout cela n'est qu'opportunisme politique et flatterie d'une frange de l'électorat français qui pourrait faire la différence en 2012. Je ne pense pas que ce soit uniquement cela : le jeu n'en valait pas la chandelle, à en juger par la déferlante de haine que chacune de ses prises de position a valu à Sarkozy dans certains médias. Et quand bien même ce ne serait que de l'opportunisme politique, nous devrions, nous aussi, nous montrer "opportunistes" et saisir ces signaux qui nous ont été envoyés par l'équipe au pouvoir. A titre personnel, je pense que les catholiques français se rendraient coupables d'une grande irresponsabilité en "boudant" cette main qui leur a été tendue. Il est probable que l'opportunité ne se représentera pas, et que les politiques de droite tireraient rapidement les leçons de l'échec de cette stratégie, pour aller voir ailleurs. Quant à la gauche, qui anticipe l'échec de la politique dite "conservatrice" de Sarkozy, elle ne manquerait pas d'en retirer la conclusion que les catho ne pèsent vraiment plus rien et peuvent être traités comme quantité négligeable.
 Voilà ! J'espère que ce petit message ne gênera personne. Il s'agit juste pour moi de partager un sentiment personnel : chacun en fait ce qu'il veut, y compris appuyer immédiatement sur la touche "suppr" ;-)). ........

Si cependant vous jugiez l'exercice intéressant, n'hésitez pas à diffuser le document ci-joint autour de vous. Bien à vous tous,.........
   Le Gouellec

Voici comment je la lis.

En autres circulations pendant la présente campagne, j’ai reçu les appels de Christine Boutin et de son parti chrétien démocrate, accompagnant le Figaro Magazine titrant sur les engagements et valeurs du Président, et aussi un tableau synoptique rappelant les positions, schématiquement (sans que j’ai vérifié l’exactitude et le fondement de chacune des présentations). Enfin, j’ai subi une homélie le matin du dimanche 22 énumérant, en exemple de péchés, les législations existantes ou projetées ou prêtées en projet à certains candidats, à propos de l’avortement et de l’euthanasie.

Je reporte à un autre écrit deux réflexions englobant celle que m’inspire cette circulaire : foi et regard ou engagement politiques, discernement intime pour voter, et j’ai déjà opiné sur la question de savoir si l’on doit voter ou non pour des valeurs.

Les engagements du président sortant quand ce sont les discours de Domrémy et de Vézelay sont de circonstance électorale, vu leur date. La militance pour les racines chrétiennes de l’Europe (« l’identité chrétienne de la France ») avait une occasion essentielle de se manifester quand a été rédigé le traité de Lisbonne dont Nicolas Sarkozy s’est aussi targué d’avoir été le principal zélateur. Le discours du Latran – dont la rédactrice est connue, comme l’a été le rédacteur du discours de Dakar – ne saurait effacer la désinvolture d’un deux fois divorcé en cours de remariage, qui entre chez le pape, le téléphone portable à l’oreille, et se tient chaussure et cheville pendant l’allocution du Saint-Père, accompagné de l’entourage le plus décalé : comédien scathologique, future belle-mère, maire de Marseille ne lâchant pas son chewing-gum. Les encouragements donnés à des prêtres reçus ad hoc à l’Elysée et le comparatif entre l’instituteur et le curé pour former les Français, ne sont pas conformes à la laïcité. Les observations des évêques quant à la légitimité des tests ADN pour vérifier l’authenticité des regroupements familiaux, tels qu’ils étaient débattus au Parlement, n’ont pas été honorées. Les réprimandes exprimées par les évêques de Belfort et de Vannes, chargés nationalement de la pastorale des Roms et des migrants (auxquelles s’est associé le pape en discours dominical) ont été proprement défiées, dès le lendemain de leur publication, par le discours de Grenoble marquant un rapprochement explicite des politiques gouvernementales avec les thèses répressives et racistes du Front national. Le Premier ministre – à défaut du président régnant – s’est insurgé contre les remontrances de l’archevêque de Toulouse sur la même question alors même que l’un est censément paroisssien de Solesmes et que l’autre est abbé émérite d’un monastère bénédictin. Devant le drame d’un renouveau de persécutions des chrétiens en tant que tels – au Proche-Orient ces années-ci après les années soviétiques – la France s’est contentée d’une audience accordée par la ministre des Affaires étrangères. J’ai à trois reprises couriellé à l’Elysée qu’il fallait saisir le Conseil de sécurité et créer un précédent, la protection de communautés non ethniques. La déclaration universelle des droits de l’homme suffisant à le motiver. Silence en réponse.

Ecrire que Nicolas Sarkozy – si tous les faits rappelés par le « paroissien » étaient de bonnes preuves de militance pour l’Eglise catholique et ses enseignements, ce qui n’est pas – est le premier, le seul président etc… c’est oublier le général de Gaulle, discret dans sa pratique religieuse (jamais de communion en public par respect de la séparation de l’Eglise et de l’Etat mais la messe dite en chapelle à l’Elysée, et l’assistance à celle du dimanche, publique en France et à l’étranger, Saint-Louis des Français, systématiquement visité où que ce soit) mais splendide dans sa pétition de filiation exprimée publiquement aux papres successifs de son époque et devant la colonie française (forcément en grande partie, le clergé) de Rome. Publication par la fondation Charles de Gaulle d’un colloque international très documenté sur le sujet [i], tenu aux Bernadins en 2009 et intervention du cardinal Vingt-Trois [ii] sur les vertus, éminemment chrétiennes, de l’homme d’Etat, son humilité notamment quand battu au referendum de 1969, il  abdique. Et même François Mitterrand, présidant à Reims le millénaire capétien, soit le baptême de Clovis, et testant qu’une messe pourra être célébrée pour ses funérailles.

Ces appels représentent une tendance dont l’unité française risque de pâtir, le communautarisme, dont certains Français juifs, flattés en cela par trop de politiques depuis 1995 et Jacques Chirac (les dîners du CRIF, le discours sur les responsbailités du Vel d’hiv.), ont initié le processus. Nos compatriotes musulmans ou d’origine africaine se sont bien gardés d’y entrer. Faire de la religion, de la foi, de la pratique un électorat en soi est contraire à l’intérêt du pays, et surtout c’est méconnaître la psychologie, le for intérieur, la liberté personnelle de la plupart des chrétiens et notamment catholiques pratiquants – dont je suis – en France.

Les catholiques en France ne sont pas et ne doivent être ni un groupe de pression, ni un lobby, ni un réseau. Si ce devait être, ils constitueraient un poids – au sens péjoratif – pour le pays et pour l’Eglise.

Si haine il y a – c’est pour moi devenu un sentiment de pitié devant tant de maladresses, d’obstination et d’occasions manquées, que j’ai chaque fois signalées par courriel au directeur du cabinet du président de la République, et dont je suis en train de faire éditer le recueil – Nicolas Sarkozy l’a cherchée en s’exposant trop personnellement malgré notre Constitution, en méprisant nos acquis, nos structures, notre Etat, chacun de nous supposés sensibles à un achat ou à une promesse d’achat si nous sommes notoires et référents, ou au simple boniment par amnésie de ce qui fut grand et efficace avant lui et de ce qu’il avait lui-même dit la veille… ce n’est pas le manque de résultat qui lui est reproché, c’est sa personnalité. La travestir en chrétien alors qu’il va tenter de rallier à la fois le Front national et le MODEM, c’est son droit, ce n’est pas notre devoir.

L’évocation de la « main tendue » est doublement paradoxale. Ce fut celle du Parti communiste français pendant la campagne menant à la victoire du Front populaire. Cela signifierait que celui qui tend la main à l’autre ne fait pas partie de ses coreligionnaires. Nicolas Sarkozy se pose en patriote protégeant la France et les Français. Peut-être… mais les chrétiens, l’Eglise en France se passent de toute protection et ont leur liberté d’appréciation en tant que citoyens, certes à la conscience informée, mais sans décalogue. La religion chrétienne a innové en s’établissant comme une relation personnelle entre la créature limitée, pécheresse et son créateur, rédempteur, incarné. Elle n’est plus une religion de la loi. Ses propres hiérarchies sont servantes, elles militent pour la solidarité comme c’était le thème des sermons de carême cette année.

Qu’il y ait une gauche-caviar, sans doute, qu’il y ait une droite cynique et en entretenant une idéologie dominante et mensongère, étiquetée libéralisme par usurpation du terme et d’une tradition biséculaire, sans doute… mais il y eut une droite de doctrine et de culture, pas seulement monarchiste, et il y a une gauche de condition sociale, de révolte devant l’injustice, de dignité, de réalisme dans des combats qui sont souvent de survie. Les prêtres diocésains sont au SMIG. Leurs opinions politiques – faites de personnalité propre mais aussi d’écoute très diversifiée – sont plurielles et ne tiennent pas, dans l’isoloir, à leur état de vie. On n’est Français et citoyen que directement et inconditionnellement. Ce fut difficile à vivre ces cinq ans quand l’image de notre pays fut présentée comme elle le fut – en posture personnelle, en discours et en actes et législations répressifs. Premier ambassadeur dans un pays anciennement soviétique, j’ai cru que représentant aussi – faute de nonce – la fille aînée de l’Eglise, je pouvais contribuer aussi bien à la liberté religieuse qu’à une ouverture des dirigeants de ce pays à d’autres mœurs diplomatiques. Je favorisai l’ouverture des relations diplomatiques avec le Vatican et eus le bonheur et l’honneur d’entretiens tête à tête avec Jean Paul II (Février 1995) et le ministre de la Justice, éminent juriste soviétique, s’approcha de la conversion au christianisme et fit même pèlerinage à Chartres, implorant comme Naaman une guérison personnelle : on peut être chrétien en fonctions très représentatives et n’être propagateur que de liberté, peut-être même de lumière. En Décembre 1965, coopérant de vingt-deux ans en Mauritanie à peine indépendante, j’entendais d’immeubles en immeubles, de villas en villas, marchant nuitamment dans une capitale encore toute de sable, d’euphorbes et de chèvres mangeant des cartonnages, les radios donnant les résultats du premier tour de la première élection présidentielle chez nous : la mise en ballotage du général de Gaulle, en partie dûe à un vote soi-disant catholique en faveur de Jean Lecanuet…  L’Afrique fut stupéfaite. Il est vrai aussi que les agriculteurs – bloc électoral tout à fait légitime – n’avaient non plus compris qui était de Gaulle, puisque celui-ci avait sciemment risqué sa réélection dès le mois de Juin précédent en imposant par « la chaise vide » à Bruxelles le financement du marché commun… agricole.

Le paroissien signataire est mal documenté et peu expérimenté. Dommage. Il n’y a pas à peser, il y a à être exemplaire et contagieux. Simplement. Il y a matière, pour un chrétien, à voter pour ou contre François Hollande, pour ou contre Nicolas Sarkozy sans qu’il se référe à ses convictions et espérances religieuses. Dieu ne racole pas.


[i] - Fondation Charles de Gaulle, Charles de Gaulle chrétien homme d’Etat (Cerf Histoire .  Août 2011 . 433 pages)

[ii] - Espoir, revue de la fondation Charles de Gaulle n° 167, hiver 2011-2012 – p. 53

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Je reçois cet écho qui est autant celui de nos circonstances électorales que de l’intuition dont j’ai fait état il y a deux matins.

----- Original Message -----
From:
Sent: Monday, April 23, 2012 2:40 PM
Subject: Re: que faut-il faire pour travailler aux oeuvres de Dieu ? - textes du jour

Je ne suis pas certain d'avoir bien compris. La réflexion politique peut être nourrie par la prière , elle le dois même, comme toute notre présence au monde. Le discernement est, je le crois et pense pouvoir le dire,pour l'avoir expérimenté, donné par surcroit. Certes le discernement n'est pas ' le fait' mais une ardente obligation pour faire la volonté du Seigneur et sans son aide nous ne pouvons rien...Pour le second tour, que faire pour bien faire?Je suis bien embarrassé.Assez naturellement pense qu'il faut ranger au placard talonnettes et rollex, mais par bien des côtés le  'flan' dont les proches, que je peux connaître pour certains, disent en privé pis que pendre, ne m'inspire guère......et son programme  sur la partie éthique ( merci de ton envoi récent) ne me paraît pas acceptable.

Le 23 avr. 2012 à 11:47, "Bertrand Fessard de Foucault" <b.fdef@wanadoo.fr> a écrit :

La réflexion politique, au lendemain d’une élection, s’apparente à la prière. Il faut y entrer sans a priori, en ne regardant que les faits et les intérêts, pas les dires ni les commentaires. Pour le croyant, le fait c’est l’Ecriture et l’intérêt, ce n’est pas – à mon sens et je crois avoir toujours été dans cette « ligne » – la récompense ou le salut, pas non plus le discernement sur la route à suivre ou l’état de vie à choisir – j’ai dans mon adolescence souvengt « instrumenté » Dieu ainsi et la réponse a été claire : Son silence m’a crié et répété mon erreur – l’intérêt c’est l’ »approche de Dieu, c’est Sa connaissance, c’est Sa compagnie, c’est Son habitat, Lui en moi comme en tous (vraie voie pour aller à tous, seule voie…) et moi en Lui, en conscience ou en simple prière d’obtenir d’habiter et de vivre ainsi. Le grand moment-instant est notre mort, alors s’administre l’expérience de l’habitation mutuelle en Dieu et Lui en nous. Je vis cela de plus en plus. Prier pour l’intelligence de notre pays… laquelle quand elle s’assure, s’exprime, retrouve ses données et ses fondements devient souvent l’intelligence de l’Europe et du monde… l’intelligence d’un pays au peuple et au territoire si pluriels ne peut qu’être imaginative, délibérative, inventive. Cette responsabilité vis-à-vis de nous-mêmes et vis-à-vis de nos frères et sœurs d’Europe, la savons-nous assez ? alors même qu’elle combine l’assurance et la connaissance, la conscience de soi, et l’ouverture aux autres et aux réalités du temps.

Voici comment j’ai envie de revenir vers un ami d’adolescence, un peu plus jeune que moi à notre époque scoute, mais l’âge adulte fait se rejoindre les quelques différences d’années de naissance. La vie nous fait tous vivre dans le même monde.


Beaucoup de questions en une seule interrogation : « que faire pour bien faire ». Je crois que la conduite de nos vies à chacun est première. Notre action dans la vie, qu’elle soit dans le registre professionnel (épanouissement ou gagne-pain, les deux pour les plus chanceux ou les plus doués, pouvant être rétribués pour leur seul talent, et encore, l’artiste et l’agriculteur ont chacun besoin d’intermédiaires) ou dans le fond affectif, amoureux, spirituel, résulte de nos convictions, de notre foi. Si à la lecture de notre vie, dans la sensation quotidienne de ce que nous vivons, tout contredit ce que nous souhaitons, voulons et croyons, nous sommes malheureux, en conflit avec nous-mêmes. La société est seconde, elle comprend tous nos semblables qui vivent le même défi que nous. S’il s’agit de concitoyens et dans le système valant pour la plupart des pays dits « occidentaux » depuis quelques générations, nous sommes à égalité les uns avec les autres. Les disparités et les inégalités dans la vie sociale et dans la vie politique tiennent malheureusement davantage des injustices, des coopérations, des réseaux, des hérédités, en réalité d’abus, que de l’évidente diversité de nos tempéraments et de nos caractères. Dans un pays vivant, vif comme le nôtre, avec de fortes mémoires collectives mais aussi de profondes dissemblances physiques : les origines familiales, les immigrations, les émigrations (les départs marquant autant que les arrivées), les régions et territorires auxquelles ajoute l’allongement de la durée moyenne de vie appelant à la coexistence de traditions personnelles, de manières de voir marquées par des circonstances qui ne sont plus, la compréhension mutuelle ne peut demeurer et s’approfondir que selon une animation politique essentiellement dédiée à cet esprit et à ce vouloir communs, et selon des responsabilités en économie consacrées au bien commun dont il est faux de postuler dogmatiquement qu’il peut s’obtenir automatiquement. C’est d’ailleurs la beauté de la vie en société qu’il faille faire effort et que presque tout soit dans la créativité à partir d’un donné respectable et consensuel, d’un inventaire de nous-mêmes rapporté au legs de nos aascendants et tendu avec frémissement par le souci de donner à nos descendants plus de chances qu’à nous-mêmes. Nous héritons de luttes, de victoires et de défaites nationales, sociales, spirituelles. Idéalement, la conscience patriotique doit embrasser tout ce champ. Cela s’enseigne-t-il ? L’expérience française montre que toujours chez nous le pouvoir politique et la famille au sens large qui peuvent être la ville, le village, la paroisse, le cercle d’amitié, d’association, même la classe sociale, ont sans cesse travailler à aviver et entretenir ce vouloir commun, cet esprit et cette langue d’ensemble. Les nouveaux venus dans notre nation le comprennent et le vivent, avec davantage d’appétit que les nantis dits natifs ou de souche. Les cent cinquante dernières années ont ajouté un troisième élément pour former ce creuset, fonctionnant en permanence : l’école, qu’il faut entendre, aussi, dans un sens très large. L’école sans doute mais toutes les institutions, tous les cercles, toutes les réunions dans la durée qui forment et font apprendre du contenu, du comportement, de la conscience de soi. Partis, syndicats, universités, équipes de gestion collective répondant des municipalités, des objets d’association, des territoires, des entreprises. Il ne peut y avoir séparation de ces trois éléments d’enseignement et de rencontre, de culture de notre patrimoine mental et de notre volonté collective.

Il faut reconnaître qu’aujourd’hui les trois éléments de ce creuset sont chacun émollients. La dérive de nos institutions constitutionnelles, mal comprises ou mal pratiquées, toujours vécues et réformées dans le sens d’une rigidité de plus en plus autiste et inefficace, quelles que soient les étiquettes des personnalités et partis au pouvoir. Notre incapacité à former des élites d’esprit national et européen, indépendantes de l’argent, de la notoriété et amoureuses du bien commun, plus heureuses de l’estime dont leur travail et leur dévouement serait entourée, que des honneurs et de l’accumulation de biens. Notre crise n’est pas économique ou financière, elle est morale, spirituelle et elle se traduit par notre incapacité à innover d’abord mentalement. La casse de soi ou la course aux modèles étrangers n’est pas une imaginatin mais l’aveu d’une impuissance. Les votes qui paraissent de rejet de la politique et de ses personnels sont en réalité une critique globale d’élites qui ont failli soit en émigrant intellectuellement, soit en se laissant envoûter par des doctrines qui n’ont jamais été les nôtres et qui au surplus ne répondent pas à la réalité, soit en se repliant sur elles-mêmes. La carte des votes du premier tour dans Paris intra muros est presque caricaturale.

Alors ? D’abord contribuer à la conscience nationale et à l’inventaire de nos patrimoines en nous écoutant les uns les autres. L’identification des difficultés et l’énoncé des remèdes est presque en totalité du ressort de chacun de nous, dès que nous nous rencontrons, sans dogmes, sans a priori et avec un préjugé d’admiration pour chacune de nos ingéniosités, car nous vivons – pour la plupart – malgré ce que nous proposent la société, l’économie, la politique actuelles. Donc une attitude d’ouverture mais aussi du travail d’intelligence, de documentation. En quoi – oui – réflexion politique et prière s’apparentent. Disponibilité à un donné, consentement à ce qu’il inspire, espérance. Dans le registre politique, espérance dans le genre humain – d’ailleurs gagée pour le chrétien par la Genèse et par la conclusion de chacun des Evangiles.

Notre vote n’est pas à taire. Interroger autrui sur son vote n’est pas indiscret. Chacun des scrutins montre pourtant que les candidats soliloquent ou dialoguent entre eux – invectives ou critiques, caricatures, rarement du fond puisqu’il s’agit de l’emporter au moins pour l’apparence à livrer aux spectateurs, et non d’atteindre une vérité reconnue comme telle par tous, et une solution acceptable par ajustements et concessions mutuelles. L’appel des citoyens aux candidats pour qu’ils entendent est nécessaire. Les technologies actuelles se sont substitués aux moyens anciens : la rue, la révolte, la révolution, les campagnes de presse. Ces moyens sont encore de mémoire d’homme : les « événements » de Mai 68, de Novembre-Décembre 95 ou les attaques qui emportèrent Valéry Giscard d’Estaing (les diamants…). Internet, les « réseaux sociaux » que je ne pratique pas mais qui ont montré leur efficacité dans les « printemps arabes » ont jusqu’à présent plus d’influence entre les citoyens et pour une seule génération d’entre eux, que pour le dialogue entre citoyens et candidats.

Le dialogue avec le pouvoir est vital. Il n’y a plus de droit divin, ni d’hérédité fondant notre régime – consensuellement pendant huit siècles – ce qui signifie que le sacré d’une fonction, celle du président de la République, mais aussi celle des élus le contrôlant et le forçant, en théorie, à délibérer sans égotisme et pour décider mieux, est une obligation dépassant les personnes. Le mandataire doit se plier à sa fonction et non pas l’accaparer et la reformuler. Interpeller le pouvoir sur sa nature et sur son exercice devrait être constant, naturel et à la portée de tous. Je m’y suis personnellement attaché, exercer avec une audience très diverse, depuis quarante ans. En ce sens – avec en plus quelques candidatures à des fonctions électives et une disponibilité à entrer, sous quelque forme et dans quelque organigramme que ce soient, dans le conseil du prince régnant ou appelé à régner – je ne me reproche aucune abstention ou passivité. Je reconnais que tout n’est à portée de chacun soit par lacune de moyens d’expression, soit faute de temps, et toute présence en famille, au travail, en état de vie religieuse, en création, en enseignement a sans doute une éloquence bien supérieure à celle d’une lettre ou d’un courriel adressés à l’Elysée ou rue de Solférino. Les parcours jouxtant la politique ou l’épousant sont très divers, et ils ne répondent pas par eux-mêmes à la question du « bien faire en votant ».

Deux paramètres apparaissent donc. Notre relation avec le pouvoir, avec la société d’une part, et cette relation dépend de nous pour son amélioration autant que de ce pouvoir toléré, apprécié, dédaigné, c’est selon… et d’autre part l’état actuel de notre ensemble social et national.

Tandis que les campagnes des divers candidats ont semblé superficielles et à côté des réelles conditions de vie et des pensées des Français, que les résultats du premier tour sont indépendants de la qualité et de la cohérence des dires et des programmes proposés, qu’ils traduisent davantage des identifications ou rejets par rapport à tel ou tel candidat (masculin/féminin) et qu’ainsi l’ensemble de notre processus électoral instruit sur les électeurs mais ne constitue pas un moment de réflexion collective, menée en commun, deux éléments – que je crois salvateurs – se dégagent.

La crise – quand elle est grave, complexe et apparemment peu soluble – réussit à la France et aux Français. Nous savons immémorialement faire de nos désastres et de nos échecs un décapage de nos scories, une émergence de nouvelles élites, un sursaut d’esprit commun. C’est manifeste depuis 1871, ce fut évident, malgré un régime défectueux, à l’issue de la Seconde guerre mondiale, selon la dialectique exceptionnelle de l’Occupation et de la Libération. Sans doute, avons-nous secrété sans scrutin deux personnalités de génie : Thiers et de Gaulle. Mais l’émergence par une crise ne donne pas forcément la fécondité pour la suite. Thiers a permis mais n’a pas administré la République, la libération du territoire, le redressement national et international, alors que toute la Cinquième République, même dévoyée comme depuis quinze ou vingt ans, s’est fondée sur la légitimité historique sans précédent d’une personnalité par elle-même remarquable, et remarquable, sans qu’on l’ait assez commenté, mais ce fut fortement ressenti par les contemporains et cela reste en mémoire, remarquable par ses vertus personnelles. L’Antiquité qui n’est plus connue ni enseignée fondait tout là-dessus. Les religions révélées, peut-être, nous ont dissuadés de la vertu en appelant à la sainteté ce qui est différent. L’époque moderne, le droit parfois, le sens familial souvent avancent une autre exhortation : l’honneur. Il est probablement à la racine de la sincérité, du respect de la démocratie. Son sens manque aujourd’hui puisque le travesti domine en politique, la théorie masque en économie des pratiques et des résultats inverses de ceux des pétitions et des doctrines.

Je crois que la crise actuelle réactualisé l’esprit national. Ce serait au politique de formuler ce que confusément les Français ressentent : 1° la dimension européenne, même s’ils la décrient et la détestent pour la simple raison que les gouvernants s’en sont fait une excuse alors même qu’ils empêchent que cette dimension devienne autonome, démocratique et donc à termes les supplantent, créant la solidarité au niveau où celle-ci doit se situer. 2° la totale fausse route en morale, en équité et surtout en résultats qu’ont été depuis vingt ou trente ans les privatisations et la mondialisation (processus de mêmes esprit et nature). 3° le goût renouvelé, intensément, d’être maître de son destin et d’être considéré. Ces sentiments qui pourraient s’écrire autrement existent. Le candidat, et surtout notre futur élu, s’il fait appel à eux avec franchise, avec audace dans la formulation, avec une remise de la décision finale aux citoyens qui l’ont porté à cette responsabilité de les animer et de les susciter, pas du tout de les gérer ou de les catéchiser, peut – même s’il est banal – obtenir de nous des miracles. Bonaparte, Clemenceau, Mendès France, de Gaulle évidemment ont su le ressentir.

Les deux candidats pour le 6 Mai ont chacun un certain don d’empathie, mais pas exceptionnels. L’un d’eux a montré qui il était et ce qu’il savait faire – je ne détaille pas, on en ferait des volumes, inutilement. L’autre n’a rien fait que discrètement pour la plupart des Français peu concernés par une ambition qui serait de naissance et par un rôle certain au sein du Parti socialiste. Il surprendra probablement mais beaucoup moins que le tenant du titre si celui-ci changeait vraiment comme il le prétend, et comme il l’a prétendu tous les semestres depuis cinq ans.

Je vote en pensant d’abord à ce que je pourrai faire vis-à-vis du nouveau pouvoir. Je considère nos élections nationales comme devenues secondaires car l’essentiel doit se jouer – en processus démocratique et en dimension économique autant que géo-stratégique – au niveau européen. C’est là que la révolution mentale et institutionnelle doit se jouer. Nos élections locales en revanche doivent devenir beaucoup plus discussives et beaucoup plus approfondies, c’est un niveau permanent, celui de la proximité. Je dégage ainsi quelques critères simples : qui, des deux, imaginera le mieux le sursaut européen et la nécessaire novation de l’Union (je préférais le mot : Communauté) européenne ? qui est ou sera accessible au citoyen, aux remontrances des anciens parlements, aux cahiers de doléance ? qui respectera sa fonction sans l’adapter à lui-même ? qui vivifiera la vie locale, la politique et le débat de proximité ? l’adhésion syndicale ? la communion des enseignants et des enseignés pour un rebond de la recherche et de la création chez nous ? Chacun de ses crières met en jeu le même ressort humain : liberté pour créer, ajouter, donner, faire passer et transmettre.

La France et les Français sont inventifs. L’évidence démocratique est que soient représentées toutes les familles d’esprit françaises dans les institutions nationales, donc au Parlement. Le premier tour de cette élection présidentielle montre que ce n’est pas le cas. Représentation proportionnelle donc à condition que les élus ne soient pas ceux des machines de partis et de comités : difficile, très difficile à organiser. La prédominance présidentielle et les mécanismes de la question de confiance à l’Assemblée nationale garantissent que ce changement du mode de scrutin ne sera pas du tout le retour à l’impuissance des Républiques précédentes. La restauration d’une vie et d’un contrôle parlementaire importe aujourd’hui davantage que la personnalité du président de la République. Le pouvoir, la pensée, la loi doivent être collectifs et non un exercice solitaire, à foucade et rodomontade.

L’évidence aussi est qu’un scrutin ne vaut que par le degré de participation des citoyens. Donc un quorum. Et alors toute l’importance du vote blanc manifestant la censure des citoyens vis-à-vis des politiques ou des élites ne sachant pas ou plus poser les questions, formules les sujets, présenter les candidatures. L’appel probable de Marine Le Pen à voter blanc va forcer à considérer puis à légiférer sur la prise en considération de ce type de vote, respectable, civique au moins autant que les votes jusques là seuls comptabilisés.

Europe, Parlement, participation à la vie locale, à la vie de l’entreprise, efficacité des réponses citoyens dans les urnes…

Reste le tempérament. On peut préférer le connu même peu vertueux et peu apprécié à l’inconnu total. Je considère que toute solution à nos empêchements nationaux et à la crise multiforme que vit un monde accouchant probablement de davantage de démocratie et de solidarité, que de guerres et de nouveaux totalitarismes, suppose la page blanche. Ces années-ci ont montré que poursuivre ce que nous faisons est catastrophique et bientôt impossible. L’inconnu procure plus de chances que le connu. Ce n’est pas l’expérience d’un des deux candidats qui doit l’emporter dans notre esprit, mais notre propre expérience de ce que nous avons vécu ces dix dernières années, au moins.

Reste les deux arguments des valeurs et de l’éthique. Celui qui s’en prévaut les a-t-il cultivés personnellement ? lui appartiennent-elles ? J’ai déjà écrit beaucoup là-dessus. L’objection de conscience, la réflexion personnelle en réponse à la loi si elle existe ou s’il s’en publie une nouvelle importent moins que de répondre des cas particuliers, des situations de vie. La généralité précisément n’est ni efficace ni même éthique car elle fait bon marché de la liberté, de la détermination et du choix de chacun. Avortement et euthanasie puisqu’il s’agit de cela sont des drames abstraits pour ceux qui les jugent mais répondent à des drames concrets pour ceux qui les vivent, qui les commettent ou aident à les commettre. Quant aux consécrations sociales – à défaut de religieuses – pour la vie en couple ou pour l’adoption d’enfants, elles me paraissent indifférentes. C’est la décomposition des familles existantes, des couples hétérosexuels déjà fondés qui me préoccupe. Statistiquement et surtout qualitativement, cette décomposition l’emporte – car elle est un échec pour les personnes et un cancer pour la société – sur les désiderata des homosexuels. Je crois ceux-ci, celles-ci de bonne volonté et même de grande honnêteté, ils/elles veulent fonder.

Je remarque que la « classe politique » brille tristement par la situation et la déshérence des couples. Trois mariages pour le président sortant. Et pour son compétiteur, le concubinage après abandon de la première compagne – que j’aurais si bien vue à l’Elysée et qui n’eût pas déparé, au lendemain du 6 Mai prochain, l’élu probable. Du moins, dans le second cas, abandonnera-t-on cette appellation ni constitutionnelle ni française de « première dame »…

Nous votons pour cinq ans, pas pour l’éternité. Le niveau européen importe plus. Si le pouvoir nous déplaît à nous de nous réapproprier l’initiative référendaire (si chichement et peureusement accordée en Juillet 2008) et s’il le faut la rue. L’essentiel est que choisir tel ou tel ne soit pas la division du pays mais le vœu de ne plus subir et au contraire de conduire, diriger nos élus, notre élu.

« Ainsi soit-il » . . .